La Flore miquelonnaise
Dès le début de la « re-colonisation » de l’archipel en 1816, et également en 1819, le naturaliste-botaniste Jean-Marie Bachelot de la Pylaie à exploré l’archipel. En 1866/67 on trouve dans la feuille officielle de la colonie, la thèse d’Alphonse Gautier « Quelques mots sur l’histoire naturelle et la météorologie de Saint–Pierre et Miquelon ».Puis, plus précisément à Miquelon, le Docteur Ernest-Amédée Delamare (entre 1866 et 1888) est en contact avec les bryologues* parisiens Renaud et Cardot. Il a exploré Miquelon-Langlade et publié avec les auteurs précités une florule de l’île Miquelon.
C’est le frère Louis-Arsène, des frères de l’Instruction Chrétienne de Ploërmel qui publia en 1927 l’étude la plus conséquente et la plus élaborée, dans le magazine botanique de Nouvelle Angleterre « Rhodora). Puis arriva dans l’Archipel en 1908 Mathurin Le Hors qui, jusqu’à sa mort en 1952, parcourut inlassablement les îles avec le Père Casimir Le Gallo, son compagnon d’exploration entre 1935 et 1946. Leurs explorations permit au frère Louis-Arsène de faire une addition de 150 espèces à la flore locale, toujours dans le magazine Rhodora en 1947. Récemment, seuls l’auteur et Daniel Abraham ce sont penchés sur nos plantes, avec quelques découvertes intéressantes de plantes indigènes.
* bryologue, botaniste étudiant les mousses.
Les habitats et la flore
Notre climat, plutôt humide et froid est favorable à la formation de tourbières, l’habitat le plus commun dans nos îles. Il existe probablement ici plus de tourbières que dans le reste du territoire français. Nous possédons d’ailleurs 30 espèces de sphaignes sur 50 pour toute l’Amérique du Nord. La famille des Cypéracées est la plus importante de la flore avec 70 espèces de Carex et une vingtaine d’autres espèces. C’est dans cet habitat que croissent la plupart de nos plantes carnivores : Sarracénie (emblème de Terre–Neuve), Droséras, Utriculaires et la majeure partie de nos 21 espèces d’Orchidées.
Les boisements où dominent les conifères (sapin, épicée, mélèze) sont surtout présents sur les pentes bien drainées et les vallées de ruisseaux. On y trouve également : amélanchiers, aulnes, bouleaux, cerisiers, cornouillers, némopanthe, sorbiers, viornes. Les sous-bois sont tapissés d’une abondance de fougères et de nombreuses espèces de plantes à fleurs.
Romain Hodapp, étudiant métropolitain, écrivait en 2003, à propos de nos petites forêts : « Ce bout de France en Amérique du Nord s’inscrit pleinement dans l’écosystème boréal nord-américain, dans sa composante océanique. Ce milieu est unique sur le territoire national et mérite, à juste titre, tout notre égard : c’est la seule forêt boréale française». La Lande à éricacées occupe la plupart des pentes de Mornes et autres terrains exposés et relativement secs, les plantes les plus caractéristiques sont les : Camarines, Cassandre caliculé, Kalmias, Myrtilles (Bleuets), Thé du Labrador, Rhododendron et le Sabot de Vénus. Les prairies humides et les berges de ruisseaux possèdent une flore particulière, quelques orchidées, de nombreuses graminées, violettes, Pigamon etc.
L’Isthme de Langlade, avec ses dunes fixées et ses étangs, les divers cordons littoraux emprisonnant des étangs légèrement saumâtres, abritent une flore particulière : oyat, spartine, élyme, rosiers, pois maritime, en terrain sec ; Spergulaires, Myriophylles, Potamots en milieu saumâtres et en bord de lagune. La Zostère (ou pailleule) si importante pour les canards et bernaches, croît en abondance dans le Grand Barachois.
Les côtes basses, dominantes sur l’île Miquelon et l’Isthme ont également leur flore particulière : Arroches, Mertensie maritime, Sabline, Caquillier etc.
Le Cap de Miquelon se distingue également par quelques espèces ne croissant pas, ou peu, dans le reste de l’Archipel : Sedum rosé, Silène acaule, Carex scirpoïde.
En conclusion, notre flore comprend environ 600 espèces de plantes vasculaires dont environ 500 indigènes et une centaine introduites, ainsi que 177 espèces de mousses (incluant les 30 espèces de sphaignes mentionnées ci-dessus) et plusieurs centaines d’espèces de Lichens. Étant donné la proximité de Terre–Neuve (20 km) l’endémisme est nul, cependant, de nombreuses espèces boréales, arctique-alpines ou américaines sont probablement uniques sur le territoire français.
Roger Etcheberry